Marianne Vergé

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LES ESSENTIELS DE MARIANNE VERGÉ

Du thé, mais pas n’importe lequel : boire plusieurs tasses de thé m’est absolument indispensable le matin. Mes préférés sont le Earl Grey que l’on trouve chez Mariage Frères, au Palais des Thés, chez Bacquié à Toulouse ou encore à la Maison Arostéguy à Biarritz. Sur la photo, c’est le “Wedding Imperial” de Mariage Frères, un thé noir avec un parfum subtil de chocolat et de caramel. Enveloppant et réconfortant..

J’ai découvert la bière “IPA” lors d’un récent séjour à NY et j’en suis devenue accro. Je ne bois pas de vin, alors mes amis (ceux qui me connaissent bien !) ont la gentillesse de me réserver une petite bouteille de bière lorsqu’ils m’invitent à dîner.

Ce poste de radio lecteur CD me suit depuis mes années étudiantes, l’époque des premiers CD. Je ne me résous pas à m’en séparer. Le son est très bon et il a un lecteur K7 au cas où je voudrais un jour ré écouter celles que je n’ai pas jetées. J’écoute beaucoup la radio. J’adore qu’on me raconte des anecdotes sur des groupes et des chanteurs, comme le fait Michka Assayas sur France Inter. J’ai écouté bien sûr Bernard Lenoir pendant des années, et plus récemment, feu l’émission de Vincent Théval “Label Pop”.

Je ne suis pas fétichiste mais cette boîte vidée de ses biscuits corses contient les billets de tous les concerts que j’ai vus. Le plus ancien, c’est Elton John en 1984, le dernier en date c’est Grandaddy, un de mes groupes préférés.
Entre les deux, j’ai gardé comme tout le monde des souvenirs impérissables, entre autres The Cure à Toulouse en 1985, House of Love à Lille en 1993, Dominique A + Divine Comedy à Strasbourg en 1994, Radiohead à Rock en Seine en 2006…

Deux disques m’ont particulièrement marquée : “Aladdin Sane” de Bowie découvert vers 11 / 12 ans, un peu avant la déferlante “Let’s dance”. Bowie, c’est une histoire familiale. Je me suis rendue compte des années plus tard que c’était également le cas chez plusieurs amis. Il a été à une époque une sorte de fil conducteur dans mes amitiés. Bref, une star qui pour beaucoup d’entre nous est mêlée à l’histoire intime.
“Psychocandy” de Jesus & Mary Chain a été un autre de ces disques importants, ceux qui marquent le passage à une autre période de la vie (j’aurais pu citer aussi un disque des Smiths). L’écouter me procure aujourd’hui autant de frissons que lorsque j’avais à 16 ans.

Une assiette pour illustrer le pays basque où j’aime de plus en plus me rendre, où la “douceur de vivre” n’est pas un cliché. Tout y est beau, doux et agréable : les villages, les paysages de mer et de montagne, la cuisine, la météo, ses habitants… Il y a aussi un très bon cinéma à Biarritz, le Royal.

Cette boîte de bonbons est décorée avec une affiche ancienne de Soulac-Sur-mer (33780), une jolie station balnéaire du Médoc – c’est aussi une commune qui a connu un petit essor économique fin XIX° / début XX° – qui m’évoque des souvenirs d’enfance et d’adolescence lumineux. Une partie de ma famille y est née, y a vécu ou y vit encore. Hélas, je n’ai plus trop d’occasions d’y aller..

Mon tapis de Yoga. Cette discipline est pour moi essentielle, je la pratique depuis une vingtaine d’années. Le Yoga compte parmi ses innombrables bénéfices celui d’éveiller les sens… voir ci-dessus.

Marianne Vergé
Avril 2017

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Jens Lekman

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LES ESSENTIELS DE JENS LEKMAN

Je ne suis pas très attaché aux objets, mais il y a certaines choses que je chéris, et dont voici les clefs.
(de gauche à droite et de haut en bas)

 1
C’est la clef de l’appartement où je vis avec ma petite amie. C’est un petit logement sympathique, dans le quartier ouest de Göteborg. Lorsqu’on a emménagé, il y avait un gros trou dans le mur. Le gars qui avait habité là plus tôt nous a dit qu’il avait construit un bar dans l’appartement à l’occasion d’une fête un jour, ce qui expliquait pourquoi il avait fait un trou dans le mur - il voulait pouvoir servir les verres à travers. On a fait réparer ce trou, on a considéré qu’on n’aurait pas besoin d’un bar chez nous. Avant je détestais ce quartier.
J’ai grandi dans une banlieue pauvre, un endroit où il était important de s’habiller comme si on valait plus que ce qu’on était. Adolescent, je me souviens avoir rencontré des gens issus du quartier où j’habite aujourd’hui, qui s’habillaient mal alors que leurs parents gagnaient bien leur vie. Je ne comprenais pas. Ils appartenaient à une classe moyenne ou à la bourgeoisie culturelle et intellectuelle, leurs parents étaient journalistes, écrivains, designers. Ils n’étaient pas richissimes mais ils connaissaient le langage et les codes de ce monde culturel auquel je voulais appartenir. Ils étaient nés dedans. Je les jalousais. Et je leur en voulais d’avoir ces privilèges.
Aujourd’hui je vis là, finalement, au milieu des cafés chers et des magasins de mobilier vintage. Tous mes amis vivent ici, qu’est-ce-que vous voulez… On a trouvé un endroit pas cher, un des derniers dans le coin. Ma petite amie et moi venons de banlieues défavorisées. Aujourd’hui elle est psychologue et elle étudie l’art. Et je suis musicien et artiste. Si nous avons des enfants, ils seront ces enfants que je haïssais quand j’étais petit. C’est-à-dire à peu près tous les jours, on peut l’entendre souffler à travers elles, comme si quelqu’un jouait du violon.

3
C’est la clef du bunker où je travaille. Je m’y suis installé il y a très peu de temps. Avant, j’avais un studio très agréable en ville, qui surplombait le gros stade d’où on pouvait entendre les hurlements, les soirs d’été, lorsque Zlatan marquait un but ou qu’Iron Maiden montait sur scène. Mais c’était devenu trop cher de rester là. Maintenant je travaille dans ce bunker avec juste une minuscule fenêtre dans un coin, et le vrombissement des camions qui secouent les murs quand ils passent à côté pour rejoindre la zone industrielle voisine.
J’ai un esprit apocalyptique, une âme survivaliste, et parfois je fantasme à l’idée que je vais voir le monde s’effondrer et se désintégrer. Une guerre nucléaire ou une épidémie.
Peut-être que c’est parce que j’ai grandi dans les années 80.  En tous cas, dans mon fantasme, je reste vivant parce que je suis dans mon bunker. Et je parviens à survivre grâce aux conserves de soupe de lentilles que j’ai stockées dans mon frigo ici, et grâce aux crackers Wasa et au beurre de cacahuète dont j’ai fait des provisions à l’épicerie du coin. Je ferme les volets pour éviter la radiation et les pillages, j’ouvre une nouvelle conserve de soupe de lentilles et je continue à travailler sur ce beat sur lequel je travaille depuis des semaines.
Le monde n’est plus et je peux continuer à faire ma musique. Personne ne va me déranger pour une histoire de promotion ridicule ou pour des dîners familiaux. Ce ne sera plus que moi, ma musique, et trois cents conserves de soupe de lentilles. Le rêve.

4
C’est la clef en or que j’ai fait faire pour mes tournées en 2009. J’ai commencé à en porter une sur scène et le gens me demandaient quelle était son utilité. Je ne savais pas quoi répondre. Mais ils ont commencé à vouloir en acheter aussi alors j’ai dit “bien sûr” et j’ai trouvé ce gars qui pouvait les fabriquer et inscrire mon nom dessus. Elles se sont très bien vendues et j’ai compris ce qu’elles représentaient déjà avant même que je commence à les éditer : ce sont des symboles de confiance en soi, de confiance en l’avenir. Vous portez cette clef quand vous savez que vous allez avoir besoin de courage, qu’il va falloir prendre une décision importante ou orienter votre vie dans une direction particulière. Elle vous rappelle qu’il ne faut pas vous dégonfler, pas cette fois mec ! Je continue de la garder avec moi où que j’aille, parfois j’en ai moi-même besoin.

5
C’est la clef du frigo où je garde mes conserves de soupe de lentilles.

Jens Lekman
Mars 2017

En collaboration avec

Article paru initialement dans le #203 de Magic RPM (mars/avril 2017)
Traduction Johanna Seban.
Mille mercis à Vincent Théval et à Magic RPM.


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I’m not much for things and objects, but I do treasure a few things and these are the keys to them.
(Left to right and top to bottom)

1
This is the key to my apartment where I live with my girlfriend. It’s a nice little place in west Gothenburg. When we moved in there was a big hole in the wall. The guy who lived here before us said he had had a bar set up once for a party, that explained why he had made a hole in the wall – so he could serve drinks through it. We had it fixed, we didn’t see a need for an indoor bar.
The area was once a place I hated. I grew up in a poor suburb, a place where it was important to dress like you were better off than you were. And as a teenager I remember meeting people from this neighborhood where I now live, who dressed down even though their parents were doing well. I didn’t get it. They belonged to a cultural and intellectual upper/middleclass, their parents were journalists, designers, writers. They weren’t necessarily filthy rich but they knew the language and codes in this world of culture that I wanted to be a part of. They were born into it. I was jealous of them. And mad at them for their privileges.
Now I live here at last, among expensive cafés and vintage furniture stores. All my friends live here so what can you do. We found a cheap place, one of the last few. Both me and my girlfriend come from poor neighborhoods. Now she’s a psychologist who studies art. And I’m a musician/ artist. If we have kids they would be those kids I hated when I grew up.

2
This is the key to my bike. It’s not a great bike. It’s the bike I got from my dad when he got a new one. A black citybike, very heavy with too much gear on it. It doesn’t receive many compliments from bike enthusiasts or people in general really. But it’s a bike that works and that’s all I want. I ride it to work everyday, it’s a 40 minute ride through the city to the other side. If I’m lucky, I catch the wind blowing in from the sea in the morning, that gives me speed and means I’ll get to work with no sweat. If I’m unlucky I’ll have that same wind blowing against me on my way home. Halfway through I ride by the cranes in the harbour, the same cranes I sing about on the track Dandelion Seed on the new album. On a windy day, which is almost everyday, you can hear the wind blowing through them, sounding like violins.

3
This is the key to my bunker where I work. I just moved in, I used to have a really nice studiospace in the city that overlooked the big stadium where on summernights you could hear the roar when Zlatan scored a goal or Iron Maiden went on stage. But it just got too expensive to stay there. Now I’m in this bunker with one tiny window in the top corner and the rumbling of trucks shaking the walls as they drive by on their way to the nearby industrial area. I have an apocalyptic mind, a prepper soul, and sometimes I fantasize about how I see the world outside crumble and disintegrate. Nuclear war or virus outbreak. Maybe a product of having grown up in the early 80’s. But in my fantasy I stay alive because I’m in my bunker. And I manage to survive on the cans of lentilsoup I’ve got stocked in my fridge here, and the Wasa crackers and the peanutbutter that I’ve been hoarding at the local market around the corner. I cover the windows for radiation and looters and while I open another can of lentilsoup I keep working on that beat I’ve been working on for weeks. The world has ended and I can just keep making music. No one to bother me with silly press requests or family dinners. Just me, my music and 300 cans of lentilsoup. What a dream.

4
This is the golden key I had made for my tours in 2009. I started wearing one just like that on stage and people asked me what it was for and I didn’t know. But they wanted to buy them so I said sure and I found this guy who could produce them and had my name inscribed on them. They sold pretty well and I managed to figure out what they stood for before I released them – they are a token of confidence and certainty. You put it on when you know you need to be brave and make a big decision or steer your life in a very specific direction. It reminds you to not chicken out, not this time buddy! I still keep this with me wherever I go, sometimes I need it myself.

5
This is the key to the fridge where I keep all my lentilsoup.

Jens Lekman
March 2017

In collaboration with

Article originally published in Magic RPM  #203 (march/april 2017)

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Dave O’Grady

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LES ESSENTIELS DE DAVE O’GRADY (aka Seaform Green)

Gibson J45 – This is the guitar that I take everywhere, I use for every gig and is my dearest friend.
Hat – I found this hat in a lovely little shop in Amsterdam a couple years, as soon as I put it on..it was difficult to take off, so I kept it.
Headphones – No explanation necessary.
Drawing – This sketch is by Rich Robinson called ‘American Beauty’, it was very generous gift from him a few years ago. I think it is a perfect combination of beauty and ugliness.
1977 Fender Champ w/picture of myself and my mother – I got this amp for £100 on a used good website, I haven’t changed anything..it sounds killer!
Writing book w/ turquoise stone – I am always trying to take note of my thoughts, where better to take them down.
Polaroid Camera – I love this camera, It’s much more special when someone wants a photo with you and you can offer them a actual photo than a stupid selfie.
Howard Marks – Mr Nice was the first book I read for pleasure whilst working on a ship in the north sea one Christmas. A man who has led an incredibly exciting life.
Incense & Pipe – Well…its good to relax.
Oscar Wilde – His writing is humbling.
Scarf – I grew up in Dublin, Ireland. My first emotional experiences were watching St Patricks Athletic win and lose. It’s also where I learned to sing…”Oh when the Saints, go marching in, Oh..”
Vinyl (Eddie Harris) – I never collected anything, so now I collect vinyl…and Eddie Harris is wonderful musician, I was never into Jazz but he grabbed me.

Dave O’Grady
February 2017


Plus d’informations sur Dave O’Grady
www.seafoamgreenband.com
mellowtonerecords.com

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Thomas Guerigen

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LES ESSENTIELS DE THOMAS GUERIGEN

Dark Crystal de Jim Henson : un de mes films fétiches, de par la technique employée de marionnettes filmées en direct.  J’espère un jour réussir à faire un long métrage avec cette même technique.

Jules Verne parce que j’aime son univers et qu’il m’a fait rêver. Je rêve d’adapter Vingt mille lieux sous les mers en animation.

Du coca zéro : ma boisson fétiche, je fais la tête quand il n’y en a pas dans un café et je suis capable d’apporter ma bouteille quand je suis invité…

Une visseuse Dewalt et un mètre Stanley, parce que j’aime bien bricoler et ce sont de bonnes marques pour ça.

Un moule, une spatule et le fouet de mon Kitchen Aid parce que j’aime faire de la pâtisserie, rien de bien élaboré mais ça me détend.

Gustave Doré, pour son œuvre mais surtout pour la composition des décors et la mise en scène dans ses gravures.

Mes clés, parce que c’est utile.

Un billet de concert, parce que j’y vais plusieurs fois par semaine.

Ma chemise fétiche bleu électrique qui commence à être un peu usée.

Et la marionnette de mon premier court-métrage Klonox.

 

Thomas Guerigen
Février 2017

 

PS: Ont été oubliés sur cette image :
– ma casquette car j’en porte toujours une mais là je l’avais justement sur la tête…
– mon MacBook avec lequel je fais tout dans ma vie.
– alors que la musique est une partie importante de ma vie, je n’ai pas mis de disques, d’albums ou de CDs car je n’ai plus rien pour les écouter.


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Rey Villalobos

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LES ESSENTIELS DE REY VILLALOBOS (House of Wolves , The Coral Sea)

In the photo I choose objects that symbolize & represent and the things that I hold close to my heart for creating music & art.
Here’s just a few of them :
My first guitar
Old tape recorder that i use to write music with
Frankincense essential oil
Passport
Car keys
Earl grey tea with medicinal mushroom powder
Kerry gold Irish butter
Sage
Grand fir needles
Douglass fir bark
Chopin nocturnes

Photo taken in my home, Ojai California, Dec 23rd 2016


Rey Villalobos
January 2017

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houseofwolvesmusic.com

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Florent Marchet

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LES ESSENTIELS DE  FLORENT MARCHET

Tabouret piano
J’ai toujours trouvé que la plupart des tabourets de piano étaient moches et inconfortables. Un jour, je suis tombé sur cet ottoman et je l’ai convaincu de devenir tabouret de piano. Sauf qu’il ne m’avait pas dit qu’il portait des roulettes. C’est assez étrange, on a l’impression que le piano est posé sur une patinoire.

Orgue Eminent Grand Théâtre
C’est en Allemagne que j’ai trouvé cet orgue mythique que l’on entend notamment sur de nombreuses musiques de François de Roubaix (à l’époque, en 2007, il était introuvable en France à l’époque, merci “Ebay monde”). Partis à 4 heures du matin de Paris avec un ami et un Marine américain (dont les bras faisaient le double de mes jambes), nous sommes arrivés à 13h10 dans ce petit village de Bavière, accueillis froidement par une petite vieille acariâtre qui nous a reproché d’avoir dix minutes de retard ! Autre mauvaise surprise, l’orgue se trouvait au deuxième étage. L’une des plus grandes souffrances physiques de toute ma vie. Je l’ai aimé si fort que mes bras s’en souviennent…

Lapin Rose
J’entre dans le Sexodrome à Pigalle avec l’intention d’y trouver un vibromasseur.
Le vendeur me demande d’être plus précis : “vaginal, anal, clitoridien ?”. J’explique mon projet : je veux créer des matières sonores en frottant l’objet vibrant sur les cordes de mon piano. Le type alors s’implique à fond, la demande étant peu banale. Après plusieurs démonstrations nous nous mettons d’accord sur un petit lapin rose parce qu’il a plusieurs vitesses et une fonction percussive. Au moment de payer.
Lui : “Vous ne serez pas déçu, en plus il est waterproof.”
Moi : “Vous savez, je mets rarement mon piano dans l’eau (au mieux sur une patinoire).”
Lui : “Je suis désolé, d’habitude c’est un argument de vente.”

Dessin Pierre La Police
Je suis fou de ce dessinateur timbré. Je vénère Les Mousquetaires de la Résurrection. Et pourtant, avec ma femme, c’est le seul terrain sur lequel on ne se retrouve pas. Les dessins de La Police l’angoissent. Par amour elle a accepté de voir trôner dans le salon ce dessin original (signé de la main du maitre) qui a servi pour la couverture du troisième tome de Véridique !

Monocorde de Poussot
J’ai toujours rêvé de savoir jouer du violon ou du violoncelle. Mais avant de pouvoir sortir un son potable il faut du temps et beaucoup de pratique. J’ai rêvé d’un instrument à cordes où les doigts ne seraient pas obligés de fabriquer les notes, comme c’est le cas pour le piano. J’en ai rêvé et en faisant des recherches, je me suis aperçu que cet instrument avait été inventé fin XIXe par Joseph Poussot. La main droite tient l’archet et la main gauche joue les notes sur le clavier. Le pied droit reproduit le vibrato. Il n’existe que très peu d’exemplaires (environ mille deux cents) pour la simple et bonne raison que Poussot s’est noyé dans la Meuse alors qu’il n’avait pas trente ans. Après des heures passées sur des forums consacrés aux instruments anciens, j’ai eu la chance d’en trouver un. En studio, je me prends parfois pour le Jordi Savall de la pop.

Harvest de Neil Young
J’aime bien réécouter ce vinyle original de Neil Young trouvé dans une boutique à Québec. En 2006, pendant l’enregistrement de mon deuxième album (Rio Baril), nous faisons souvent référence à Harvest. Avec mon camarade Erik Arnaud nous partons à Los Angeles pour le mixage de l’album. Le studio étant assez cher, on fait un effort sur l’hébergement : l’hôtel est donc sordide mais j’aime bien cette ambiance (disons les mots, c’est quasi un hôtel de passe). Allongés sur un lit étroit et carcéral, il est difficile de trouver le sommeil, tout jet-lagués que nous sommes. Alors à quatre heures du matin nous allumons machinalement la télé et tombons sur un concert de Neil Young. Le lendemain, j’arrive dans la cour du studio et je tombe sur un type un peu crasseux avec un chien qui l’est tout autant. Je le salue, le type prend son café. Sa tête me dit vraiment quelque chose. Je rassemble ma mémoire afin de savoir dans quel bar du Berry j’ai bien pu le croiser (même si c’est peu probable). J’arrive dans la cabine de mixage, l’ingé son me dit que notre voisin de studio aujourd’hui n’est autre que Neil Young. Je retourne dans la cour, Neil envolé, disparu ! Nous ne le reverrons pas de la journée. Nous nous consolerons en caressant son chien dans la cour et lui lançant la balle, c’est déjà ça.

Florent Marchet
Janvier 2017

En collaboration avec

Article paru initialement dans le #202 de Magic RPM (janvier/ février 2017)
Photographies par Julien Bourgeois / Mille mercis à Vincent Théval et à Magic RPM.


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Le dernier album de Frère Animal, Second Tour est disponible chez PIAS LE LABEL

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Boyarin

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LES ESSENTIELS DE BOYARIN

Cher Pascal,

J’ai mis un temps délirant à te répondre. J’ai eu le plaisir de lire la série d’autoportraits des Essentiels dès le printemps dernier, au moment où tu m’as proposé de participer à cette série : les gens invités ont des choses précises à dire, les photos sont belles, les textes intéressants et érudits ; cela m’a impressionné, et je doute vraiment d’avoir des choses aussi précises, intéressantes ou érudites à dire sur mes propres goûts, et la capacité de les décrire en quelques œuvres ou objets repères. (Par ailleurs, mes photos souffrent d’un amateurisme embarrassant).

J’ai constamment freiné au moment d’opérer une sélection d’objets fétiches. J’ai un léger souci avec les objets. Je ne trouve rien de plus déroutant que les objets : ils sont à la fois rassurants et suspects ; porteurs de mémoires émouvantes, mais émotionnellement sacrément encombrants. Par ailleurs j’ai autour de moi, essentiellement, des objets surtout banals, remplaçables. Sûrement rien d’essentiel. Tout est provisoire, jetable : j’ai déjà donné, perdu, me suis fait voler, subi la casse de toute catégories d’objets, disques, livres, ordinateurs, instruments de musiques, etc. Je ne dis pas qu’ils m’indiffèrent, il y a des objets auxquelles je tiens, que je serais peiné de perdre : mais je les perdrais quand même et ce ne serait pas si tragique.

J’ai également passé un temps terrible à chercher ce qui correspondrait à une valeur intime d’essentiel. Est-ce que j’ai forgé un palais mental, inaltéré, aux contours nets ? Y a-t-il des choses qui brillent d’un éclat plus fort, un éclat directeur ? A priori oui, des moments, des musiques, des récits, des visages… Des choses plus investies que d’autres, sur lesquelles je m’appuie davantage. Mais en essayant de les cerner plus sérieusement, tout cela finit par s’embrouiller : tout moment, tout visage, toute sensation d’attachement paraissent dépendre d’une série infinie d’événements qui les ont environnés, mais aussi de mémoires reconstituées, autant que d’oublis, qui les mélangent, les réadaptent, en changent les couleurs. Pour prendre un exemple, j’ai tendance à me dire spontanément que les musiques les plus essentielles sont celles que j’ai découvertes étant enfant. Je sélectionne ainsi le souvenir d’une petite poignée de disques parmi ceux que possédaient mes parents (dont je n’ai, d’ailleurs, plus matériellement la trace depuis longtemps) : les bandes-sons de Kubrick, A Clockwork Orange et Barry Lyndon, le Sergeant Pepper’s Lonely Heart Club Band des Beatles, Peer Gynt par John Barbirolli, mais aussi les partitions de ces petites danses baroques apprises très tôt à la guitare classique, ces sarabandes et ces gavottes, ou alors les musiques aigrelettes et mystérieusement riches de ces jeux vidéos du siècle précédent. Mais pourquoi celles-ci plutôt que d’autres ? Pourquoi celles dont je me souviens spontanément seraient-elles plus essentielles que celles que j’oublie ? Comment mesurer la part d’arbitraire dans cette reconstitution qui, a posteriori, semble me conforter un peu trop ? Peut-être y a-t-il eu des déclics secrets, des moments ensevelis qui ont donné un appui à tout le reste, des agents secrets de ma manière d’approcher les choses – si jamais, ce qui est très contestable, j’ai une quelconque manière d’approcher les choses.

En fin de compte, ce qui me soucie, c’est cette propension à se construire des points d’ancrage pour une identité personnelle. La fixation d’une identité me pose vraiment problème. Je ne dis pas que je cherche à me construire un univers vidé de tout référent particulier. En réalité j’ai tendance à accumuler des petites choses de rien – cailloux, coquillages, jouets ou figurines trouvés un peu par hasard, cartes et plans divers, images hétéroclites… Je ne cherche pas vraiment à savoir quelles sont leurs vertus ou leur effet curatifs. C’est seulement bien qu’elles soient là. Je dis bien, pas essentiel. J’ai tendance à penser qu’elles sont là, justement, pour éviter de se fonder trop sérieusement une identité, pour alléger le fardeau d’être soi plutôt que quelqu’un d’autre, le fardeau de vivre en un lieu précis, le fardeau d’avoir à construire et aménager un espace intérieur trop défini. Je vois un lien (si je puis me permettre) avec la musique que je fais. Cette musique est très pleine, voire confuse, c’est ce qu’on remarque (et, régulièrement, reproche) le plus souvent, mais en réalité cette superposition de couche me semble un exercice pour créer des évidements, du pas-connu, autrement dit pour décoller de ce qui est trop familier, et construire de nouvelles mémoires imaginaires.

Tout cela (et c’est trop long), pour finir par confesser que je ne préfère pas vraiment déterminer ce qui est essentiel. Je préfère ne pas être certains de mes repères. Ils empêcheraient de se perdre – puis de se retrouver d’une manière imprévue. Quand j’essaie d’arriver à un résultat substantiel, les intentions et les décisions y menant sont perpétuellement vagues et confuses, et c’est très bien ainsi. Pour finir – et je suis un peu embarrassé parce que cela ressemble à une pirouette assez tiède –, ce qui est vraiment essentiel est la capacité du réel à me surprendre et me déloger, et toutes ces parts, tous ces lieux et tous ces phénomènes en sont potentiellement capables. Donc, attachées à ces considérations assez poussives, j’ajoute quelques images vues. Elles sont à mes yeux des signes (parmi une infinité d’autres possibles) de tout ce qui est potentiellement vital et que je renonce à classer et nommer.

Boyarin
Janvier 2017

 


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boyarin.bandcamp.com

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Sophie Feuillade

LES ESSENTIELS DE SOPHIE FEUILLADE

Musique is my boy friend à défaut des coups (sans l’accent espagnol) de foudre de Trafalgar et des vieux punks en costard.
Bisou.

Sophie Feuillade
Décembre 2016

 


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Arnaud Le Gouefflec

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LES ESSENTIELS D’ARNAUD LE GOUEFFLEC

Alors si je devais choisir une série d’objets ou d’éléments “représentatifs”, je ferai dans la monomaniaquerie, et je prendrais les 10 volumes de la série Back from the grave en piétinant la diversité, la pluralité et la variété avec mes bottes. Je suis fou des Back from the grave depuis ma plus tendre adolescence, et ça ne s’est pas arrangé avec l’âge : je viens de terminer d’en faire la complète acquisition et je pavlovise devant en ce moment même.

Les Back from the grave dont des compilations de 45 tours obscurs des sixties, parfois inédits, oubliés, perdus pour la science, qu’un fossoyeur du nom de Tim Warren a exhumé et sauvé de l’oubli, en écumant les studios, les vide-greniers, en frappant aux portes des vétérans. Je suis fasciné par l’obscurité, surtout quand il en sort quelque chose. Je suis fasciné par ce qui sort victorieux des ténèbres. Je crois que l’énergie créatrice vient de l’underground et que lorsqu’un contenu underground crève la surface et accède à une certaine lumière, la lumière elle-même en est changée, et le monde avec.

Les Back from the grave sont un défi à l’oubli, à l’indifférence. Il y a une forme de revanche là-dedans. Les Cramps, le groupes de psychobilly qui a beaucoup fait pour la réhabilitation de ce genre de groupes et qui est remercié sur les notes de pochette du volume 8, en a fait une devise : “Les Cramps sont là pour se venger.” Ça m’a profondément ému. Rien n’est plus beau qu’une belle revanche, surtout quand c’est contre la mort.

Les Back from the grave sont des compilations de sixties punk, c’est à dire de groupes qui, dix ans avant la date, sont déjà punk, pratiquent un rock primal, violent, bas de caisse, super, qui fait souvent passer les productions punk des années 80 pour des bluettes. Ce sont des groupes anachroniques et j’aime l’anachronisme, je le recherche tout le temps, car c’est un moyen subtil de voyager dans le temps.

Les Back from the grave sont des compilations de groupes adolescents. Je crois qu’on doit des comptes à l’adolescent qu’on a été. Je crois qu’à cet âge là, il y a des chose qu’on voit, et que ces choses-là ne peuvent être balayées d’un ricanement par l’adulte qui arrivera derrière.

Les Back from the grave sont une des pièces du grand puzzle du rock’n’roll, cette énergie venue d’on ne sait où, et qui s’est incarnée plusieurs fois, à différentes époques et dans des lieux renouvelés. Les Back from the grave témoignent de son passage dans les États-Unis des 60s. Je l’ai traquée dans les discothèques de prêt et chez les disquaires : on la recroise souvent, ici ou là sur le globe. Soyons vigilants. Elle repassera bientôt.

Pour toutes ces raisons, les Back from the grave sont une motivation pour se lever le matin, une bonne raison de naître, et un permis pour sortir de sa tombe.

Voilà ce que je voulais dire sur les Back from the grave et sur la vie en général.

Arnaud Le Gouëfflec
Novembre 2016

 


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Gildas Secretin

LES ESSENTIELS DE GILDAS SECRETIN

1- Des objets divers et variés
J’en ai des kilos. Chaque objet est un souvenir propre, il a son histoire et sa charge émotionnelle. C’est pourquoi je ne m’en sépare pas. Et que j’en ai des kilos…
2- Mon bureau de travail
Ici en mode “home studio”, il est plus généralement en mode “studio graphique”. Dans une circonférence de 2 mètres autour de mon iMac (qui se compose de tiroirs remplis à ras bord, d’étagères garnies et de recoins oubliés) se trouve l’essentiel de ce dont j’ai besoin pour travailler. J’y passe le plus clair de mes journées … C’est mon vis-à-vis quotidien et cela se passe bien pour l’essentiel.
3- Des épices
Plus généralement tout ce qui a un rapport avec la cuisine. Je suis souvent aux fourneaux.
4- Un carnet et un crayon.
On a toujours besoin d’un carnet. On pourrait dire la même chose d’un bon crayon mais je n’ai pas tant d’affinités avec les crayons qu’avec les carnets … un critérium de base fait l’affaire, de temps en temps un bon feutre. Mon stylet se tape l’incrustation sur la photo, il n’a pas vraiment sa place ici mais c’est en fait le “stylo” que j’utilise le plus …
5- De la nature
6- Des bouquins et de la musique
Je travaille toujours en musique. Liste non exhaustive et incomplète de ce que j’écoutais dernièrement dans la petite étagère (Lou Reed, Biolay, Chevalrex, Devendra, Vincent Liben … ) Non visible sur l’étagère : Rémi Parson, Nicolas Jaar, Nick Cave …
Quelques bouquins aussi. En résumé des lectures assez mainstream : de la SF pour me détendre, de la poésie pour me baigner, un peu d’ésotérisme ou de mythologie pour gamberger, et un petit chef d’œuvre de temps en temps (ici Basile et Massue de Arnaud Le Gouëfflec) pour remettre les pendules à l’heure.

Non présent sur ces photos : la famille évidemment, les amis cela va de soit, et mes appareils photos.

Gildas Secretin
Novembre 2016

 


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